À l’aune de la crise sanitaire provoquée par le COVID-19, GAIA lance une nouvelle campagne appelant à la fermeture des marchés humides dans le monde entier. Par ailleurs, nous demandons que le commerce mondial d’animaux capturés à l’état sauvage ainsi que les transports d’animaux sur de longues distances soient mis à l’arrêt.
Les « marchés humides » (wet markets, en anglais) doivent en partie leur nom au sang, aux viscères, aux écailles et à l’eau qui imprègnent le sol des étals… tous issus des restes d’animaux tués cruellement pour leur viande. En d’autres mots, il s’agit d’abattoirs à ciel ouvert.
Sur ces marchés, on voit des animaux sauvages mêlés à d’autres animaux tels que des civettes, des ratons laveurs, des crocodiles et des chiens vivre dans des conditions dégoûtantes, souffrant de déshydratation, de famine et de maladie.
Ces marchés constituent également une menace pour la santé publique et ont été à l’origine d’épidémies avérées dans le passé, notamment du SRAS. Les chercheurs pensent que le COVID-19 a une origine similaire. La souche du virus à l’origine de la pandémie provient très probablement d’un marché humide de Wuhan, en Chine, connu pour le commerce d’animaux sauvages et d’espèces protégées.
Photos : Jo-Anne McArthur / We Animals
Comment éviter les prochaines pandémies
1. Interdire les marchés humides
La crise sanitaire actuelle montre, une fois de plus, qu’il n’y a pas de place pour les « marchés humides » si nous voulons éviter les pandémies et la souffrance animale à grande échelle.
GAIA demande instamment à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) d’interdire tous les marchés humides en Chine, au Vietnam, au Laos, en Thaïlande, en Birmanie et au Cambodge. Non seulement ces marchés représentent un danger immédiat pour les humains, mais ils sont aussi intensément cruels et odieusement inhumains pour les animaux.
2. Interdire le commerce d'animaux sauvages
Nous savons d’où vient le SRAS : le virus a très probablement été transmis par des chauves-souris aux civettes et, par la suite, aux humains. Le nouveau Coronavirus pourrait avoir une origine similaire : de la chauve-souris à l’homme, en passant par les pangolins, les animaux sauvages les plus commercialisés au monde. Dans le cas du SRAS, on a rapidement découvert que les vendeurs d’animaux sauvages possédaient les bons anticorps. Les faits remontent à 2003… Et pourtant, à l’époque le gouvernement chinois n’a pas voulu adopter d’approche drastique contre le commerce des animaux sauvages.
3. Abandonner l'élevage intensif/industriel
GAIA le dénonce depuis des années : l’élevage intensif/industriel n’est ni respectueux des animaux, ni durable, ni sain.
Dans les élevages conventionnels, les conditions de détention et la densité au m² sont telles que les animaux ne pourront jamais exprimer leurs besoins naturels. Sans accès à l’extérieur, à la lumière du jour, et agglutinés les uns contre les autres, ils ne sont traités que comme de vulgaires produits. Le manque de diversité génétique dans les élevages intensifs/industriels peut aussi augmenter la sensibilité aux maladies en cas d’épidémie. Il est urgent de changer de modèle.
4. Mette fin aux longs transports d'animaux vivants
Des temps d’attente de 18 heures entre l’Allemagne et la Pologne, 40 kilomètres de bouchons entre la Lituanie et la Pologne, 3 heures pour parcourir 300 mètres en Bulgarie... On sait les conditions de transport d’animaux vivants particulièrement horribles en temps « normal » ; elles sont devenues infernales avec la crise sanitaire du Covid-19.
Or, sur de longues distances, les transports d’animaux sont des vecteurs potentiels de maladies animales aux conséquences désastreuses. Avec plus de 65 ONG de protection animale, GAIA appelle l’UE à interdire le transport d’animaux vivants sur de longues distances, ainsi que les transports qui durent plus de 8 heures.
L'OMS, les Nations Unies et l'Europe doivent prendre position
L’heure n’est plus aux demi-mesures. Il faut définitivement fermer les marchés humides, terreaux fertiles pour des virus infectieux comme le COVID-19, lieux d’une cruauté incommensurable et d’un manque flagrant d’hygiène de base. Le commerce mondial des animaux capturés dans la nature doit également être freiné, voire banni. Les longs transports d’animaux vivants (principalement vers des pays tiers) sont aussi des vecteurs potentiels de maladies animales aux conséquences désastreuses et, par conséquent, ils doivent aussi être mis à l’arrêt. Il faut, de toute urgence, enclencher la transition vers le transport de viande et de carcasses dans des camions frigorifiques – et non plus d’animaux vivants sur de longues distances.
La véritable opportunité de cette crise est qu’elle peut servir de signal d’alarme. Il est temps d’agir pour les animaux et pour notre propre santé.
Quelles sont les causes de ce fléau ?
Les marchés humides : foyers de maladies et de crualité
Les « marchés humides » sont à la fois des abattoirs et des animaleries à ciel ouvert. Sur ces marchés, des animaux vivants sont brutalement abattus pour les clients qui souhaitent manger de la viande fraîche. Les animaux sauvages et les animaux d’élevage sont mélangés dans des cages exiguës et des enclos insalubres, créant ainsi un terrain fertile pour les maladies zoonotiques comme le COVID-19. C’est à cause des crises de santé publique que ces marchés provoquent, ainsi que des souffrances intenses infligées aux animaux, que ces marchés humides doivent être interdits.
Transports d'animaux : des conditions propices aux maladies
Le 16 mars dernier, la Commission européenne a insisté sur le fait que « le transport du bétail entre les États-membres doit se poursuivre malgré l’épidémie ». Résultat : de longues files d’attente aux frontières des États membres de l’UE, ainsi qu’aux postes frontières des pays tiers tels que la Turquie. La situation est devenu tellement extrême qu’on observe des temps d’attente de 18 heures entre l’Allemagne et la Pologne, 40 kilomètres de bouchons entre la Lituanie et la Pologne, ou encore d’immenses embouteillages à la frontière bulgaro-turque. Cette situation entraîne des souffrances supplémentaires pour les animaux et augmente le risque de propagation du coronavirus par les chauffeurs de camions et les contrôleurs, qui entrent en contact avec d’autres personnes issues de zones infectées.
2 000 km parcourus, plus de 50 h de voyage : c’est le calvaire vécu par les 200 000 veaux exportés chaque année d’Irlande. Et ce n’est qu’un exemple parmi d’autres, car chaque année, près d’un milliard de volailles et 37 millions de bovins, cochons, moutons, chèvres et équidés sont transportés vivants à l’intérieur de l’Union européenne et vers des pays tiers. Aujourd’hui, avec des heures d’attente aux postes frontières, ces transports prennent une dimension scandaleuse supplémentaire avec le coronavirus. Les longs transports d’animaux vivants (principalement vers des pays tiers) sont aussi des vecteurs potentiels de maladies animales aux conséquences désastreuses et, par conséquent, ils doivent être mis à l’arrêt. Il faut, de toute urgence, enclencher la transition vers le transport de viande et de carcasses dans des camions frigorifiques – et non plus d’animaux vivants.
L'élevage intensif/industriel favorise les maladies
Un groupe de travail des Nations Unies a déclaré que « les épidémies de grippe aviaire hautement pathogène (IAHP) sont généralement associées à une production intensive de volaille, au commerce et systèmes de commercialisation ». Les maladies se propagent à partir d’animaux élevés de manière intensive et extensive. Cependant, plus le nombre d’animaux est grand, plus les densités dans les bâtiments sont élevées, et plus le risque augmente d’apparition et de propagation des maladies. L’élevage intensif, qui implique un grand nombre d’animaux enfermés à l’intérieur et des densités extrêmes, augmente forcément le risque de transmission des maladies parmi les animaux. Ceci est particulièrement le cas pour les porcs et les volailles. Par ailleurs, si une épidémie zoonotique touche les cheptels d’animaux, la réponse des autorités est toujours la même : pour éviter la fermeture des marchés d’exportation, on préfère tuer massivement des centaines de milliers d’animaux plutôt que de les soigner. L’économie prime toujours sur les soins.
Viande de brousse : un trafic illégal et dangereux
Antilopes, singes, pangolins... Le commerce croissant de viande de brousse décime la forêt tropicale : de plus en plus d’espèces sont menacées d’extinction. En raison de la déforestation, les chasseurs ont plus facilement accès à des zones auparavant inaccessibles. La viande de brousse représente aussi un risque pour la santé publique : elle est susceptible d’introduire des maladies virales dangereuses comme le virus Ebola. Or la Belgique reste une plaque tournante de ce trafic juteux : à partir d’une étude menée en 2017 et 2018 par l’université de Liège, le ministère belge de la Santé estime que « 44,4 tonnes » de viande de brousse africaine transitent chaque année à l’aéroport de Zaventem, généralement dans les bagages des passagers des vols commerciaux. Cette viande peut contenir des bactéries pathogènes pour l’homme pouvant provoquer une intoxication alimentaire, une gastro-entérite et d’autres infections bactériennes. La destruction des habitats des animaux sauvages ainsi que la perte de biodiversité et d’écosystèmes, induites par les activités humaines, sont des éléments clés de l’émergence de nouvelles maladies. Pour ces raisons, le commerce d’animaux sauvages capturés dans la nature doit être interdit. Avec d’autres associations, GAIA souhaite convaincre les États concernés, les États membres et la Commission européenne de mettre un terme à ces commerces nocifs pour la faune et l’homme.
Les zoonoses sont des maladies ou infections qui se transmettent des animaux aux humains.
Selon les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) des États-Unis, trois maladies infectieuses nouvelles ou émergentes sur quatre proviennent d’animaux. C’est le cas par exemple des Escherichia Coli (E. Coli), Campylobacter, Salmonelles… Et ce n’est pas nouveau, la grippe espagnole qui a sévi au début du 20ème siècle provenait des oiseaux, la maladie de Creutzfeldt-Jakob (maladie dite de la vache folle) est liée aux bovins, l’épidémie d’Ebola en Afrique est liée à la viande de brousse et plus récemment la grippe aviaire H5N1 ou la grippe porcine… les exemples sont hélas nombreux.
L’OMS a déclaré que la source animale du COVID-19 n’a pas encore été confirmée, bien que plusieurs virologues de renom s’accordent sur l’origine animale du virus.
Ce sont a priori les animaux sauvages plutôt que les animaux d’élevage qui sont les hôtes naturels de la plupart des bactéries, virus et autres micro-organismes qui peuvent provoquer des maladies transmissibles aux humains. Les précédents coronavirus similaires ont pu provenir de chauves-souris et se propager à d’autres animaux sauvages. L’épidémie de SRAS de 2003 a par exemple probablement été transmis à l’homme par des animaux sauvages vendus sur les marchés d’animaux vivants.
Les marchés d’animaux sauvages vivants sont répandus en Chine, dans certaines parties de l’Asie du Sud-Est et en Afrique. Des animaux sauvages, du pangolin à la chauve-souris, sont mis en cages, les uns près des autres pour être vendus alors qu’à l’état sauvage ces espèces n’auraient jamais été en contact.
La proximité avec les humains constitue le terreau idéal pour les zoonoses, c’est à dire les maladies animales transmissibles aux humains. On ne peut ignorer qu’actuellement ces marchés sont une source essentielle de nourriture et de revenus pour des centaines de millions de personnes parmi les plus pauvres du monde. En Chine par exemple, la consommation d’animaux sauvage a fait suite à la grande famine de 1960. Il est à noter qu’en raison du COVID-19, les autorités chinoises viennent d’interdire la consommation d’animaux sauvages (en ce, y compris les chiens et les chats, à l’exception des animaux à fourrure).
Oui, dans de nombreux cas.
La propagation des maladies est souvent imputée aux animaux sauvages, mais les déplacements des personnes, des animaux et des biens est le principal facteur de propagation. Un groupe de travail des Nations Unies a déclaré que « les épidémies de grippe aviaire hautement pathogène (IAHP) sont généralement associées à une production intensive de volaille, au commerce et systèmes de commercialisation ».
Les maladies se propagent à partir d’animaux élevés de manière intensive ET extensive. Cependant, plus le nombre d’animaux est grand, plus les densités dans les bâtiments sont élevées, et plus le risque augmente d’apparition et de propagation des maladies.
L’élevage intensif, qui implique un grand nombre d’animaux enfermés à l’intérieur et des densités très élevées, augmente forcément le risque de transmission des maladies parmi les animaux. Ceci est particulièrement le cas pour les porcs et les volailles.
De plus, les élevages intensifs utilisent généralement des animaux à faible diversité génétique et les conditions d’extrême densité et de confinement dans ces élevages provoquent souvent un affaiblissement du système immunitaire des animaux. La grande majorité des 65 milliards de poulets de chair abattus chaque année proviennent par exemple d’une dizaine de croisements hybrides seulement produits par trois entreprises mondiales et vendus dans le monde entier. Celles-ci ont remplacé d’innombrables races traditionnelles, qui s’étaient adaptées au fil des siècles aux conditions locales.
Ce manque de diversité génétique des animaux élevés et leurs fortes densités dans les bâtiments offrent des conditions idéales pour que les agents pathogènes se propagent rapidement, ainsi que davantage d’opportunités pour eux de muter en de nouvelles souches plus virulentes. Enfin, même si l’on constate une légère diminution en Europe, l’utilisation massive d’antibiotiques dans les élevages d’animaux a aussi pour effet d’augmenter les bactéries résistantes aux antibiotiques – et par conséquent, de baisser l’immunité des personnes mangeant de la viande, puisque ces antibiotiques se retrouvent sous forme de résidus dans l’assiette du consommateur. Selon l’Organisation mondiale de la santé, l’augmentation de la résistance aux antibiotiques est l’une des plus grandes menaces pour notre santé et la sécurité alimentaire. Pour assurer notre propre santé à l’avenir, il est primordial de réduire drastiquement l’utilisation des animaux dans notre chaîne alimentaire.
Alors que nous traversons en Europe et dans le monde, une période exceptionnelle, la Commission européenne insiste pour que le transport d’animaux vivants entre les pays de l’UE se poursuive. Ces lignes directrices ne tiennent pas compte des graves problèmes rencontrés aux frontières, qui impactent la santé et le bien-être des animaux transportés, en particulier ceux transportés entre des pays de l’UE et des pays tiers.
Avec la crise européenne dûe au COVID-19, ont ainsi pu être observés :
- Des véhicules transportant des animaux qui se sont vu refuser l’entrée en Croatie.
- Des files d’attente de 40 km à la frontière entre la Lituanie et la Pologne.
- Des files d’attente du côté allemand de la frontière avec la Pologne de 65 km conduisant à des temps d’attente de 18 heures.
- Les véhicules avec des animaux sont également pris dans de très longues files d’attente au point de sortie entre la Bulgarie et la Turquie - des chauffeurs transportant des animaux de ferme ont déclaré à l’ONG Animals’s Angels qu’ils mettaient trois heures pour faire 300 m à l’intérieur de la frontière.
Il existe de plus un risque réel que les pays ferment leurs frontières sans disposer des infrastructures nécessaires pour répondre aux besoins des animaux transportés et de la législation européenne en matière de bien-être animal. Des requis de base comme suffisamment de nourriture, d’eau et de lieux de repos. Selon un arrêt de la Cour européenne de justice, la règlementation européenne sur les transports d’animaux reste d’application dans les pays tiers vers lesquels ces animaux sont acheminés. Elle doit donc être respectée par les transporteurs. Or, passé les frontières de l’Union, où ces animaux sont violemment déchargés, le système de contrôle est inexistant ou laxiste. Le seul moyen d’éviter ces souffrances indignes est de n’autoriser que l’exportation de viande, et non d’animaux vivants.