Par ses arrêts rendus aujourd’hui, le 4 avril 2019, la Cour constitutionnelle belge s’est penchée sur les recours en annulation contre les décrets wallon et flamand interdisant l’abattage sans étourdissement. Les recours en annulation wallons ont été déclarés sans objet pour des raisons techniques, en l'occurrence l’entrée en application du Code wallon du Bien-être animal. Et aucune décision n’est encore tombée à propos des recours en annulation flamands. La Cour constitutionnelle pose par ailleurs plusieurs questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’Union européenne au Luxembourg. GAIA en prend acte, et se prépare à soutenir, en tant que partie intervenante, les régions wallonne et flamande devant la Cour européenne de Justice lorsque l’affaire y sera traitée. “La Cour constitutionnelle remet la patate chaude à l’Union européenne”, commente Michel Vandenbosch, le président de GAIA. "Nous sommes confiants."
Par ses questions, la Cour constitutionnelle cherche premièrement à savoir si le Règlement (CE) No 1099/2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort permet d’interdire l’abattage sans étourdissement. Le Règlement européen prévoit en effet que les abattages sans étourdissement sont possibles lorsqu’ils répondent à un rite religieux, à condition qu’ils aient lieu dans un abattoir agréé et permanent. Cependant, il permet également aux États membres d’aller plus loin pour renforcer le bien-être animal.
Question préjudicielles
Selon GAIA, il ne fait pas de doute que la Cour européenne de Justice au Luxembourg va répondre positivement à cette première question : le Règlement européen prévoit lui-même que les États membres peuvent appliquer des règles plus strictes que ce que ne dicte ce même Règlement, et cela inclut donc une interdiction de l’abattage sans étourdissement dans les abattoirs fixes - y compris dans le cadre d’un rite religieux. Cela est d’ailleurs confirmé dans les différents avis du Conseil d’État : les États membres de l’UE peuvent aller plus loin que le Règlement.
La deuxième et troisième question posées à la Cour européenne de Justice visent à savoir si la Belgique, en étant plus stricte que le Règlement, ne va pas à l’encontre de la liberté de culte. Dans ce contexte, la Cour renvoie au fait que le Règlement européen en question ne s’applique ni à la chasse, ni à la pêche. La Cour constitutionnelle belge veut donc indirectement savoir s’il n’est pas question de discrimination religieuse.
GAIA est confiant
L’avocat de GAIA, Maître Godfroid, qui travaille sur cette affaire, commente : “Nous irons au Luxembourg en confiance. Il est évidemment possible pour les États membres d’aller plus loin que la loi européenne, et donc d’interdire l’abattage sans étourdissement dans les abattoirs. C’est ce qu’ont d’ailleurs déjà fait plusieurs États membres - récemment la Slovénie, le Danemark, la Suède... - sans que cela ne pose problème à la Commission européenne. Et dans différents avis, le Conseil d’État de Belgique a aussi confirmé que le Règlement européen permet d’imposer légalement l’étourdissement avant chaque abattage d’un animal dans un abattoir.”
“Je suis également optimiste à propos des autres questions. La Cour de Justice nous a aussi donné raison dans la dernière affaire de GAIA concernant les sites d’abattage temporaires en Flandre qui ont été déclarés définitivement illégaux : la décision n’est pas contraire à la liberté de culte.” Un arrêt précédent de la Cour de Justice au Luxembourg (26/02/2019) indique explicitement que l’abattage sans étourdissement implique pour les animaux de graves souffrances, et que le bien-être animal est davantage garanti en appliquant un étourdissement. C’est pour cette raison que le logo de production biologique européen ne peut pas être apposé sur la viande d’animaux abattus sans étourdissement.
Pas de discrimination
Michel Vandenbosch, le président de GAIA, ajoute : “La question d’une discrimination avec la chasse et la pêche est l’ultime tentative de la part d’organisations religieuses de renverser les décrets wallon et flamand. Or l’interdiction de l’abattage sans étourdissement vise uniquement à épargner aux animaux une souffrance techniquement évitable. Les animaux en élevage sont sous l’égide de l’humain. Au 21ème siècle, rien ne justifie de ne pas étourdir ces animaux avant de les abattre. Le procédé d’abattage doit se réaliser dans un abattoir correctement équipé. Les activités de chasse et de pêche ne se produisent en effet pas dans un abattoir. Ce sont des situations fondamentalement différentes, il ne peut être question de discrimination, et encore moins d’oppression religieuse.”